Burkina Faso : disparition de journalistes et de magistrats, inquiétudes sur une dérive autoritaire du régime Traoré
- Amadou Diallo
- 15 oct.
- 3 min de lecture

Au Burkina Faso, la disparition simultanée de deux journalistes et de trois magistrats suscite une vive inquiétude quant à l’évolution du régime du capitaine Ibrahim Traoré. Selon plusieurs sources concordantes, ces personnalités auraient été enlevées par des agents présumés du renseignement national avant de disparaître sans laisser de trace. Un épisode inédit qui ébranle les milieux de la presse et de la justice, déjà sous forte pression depuis la prise de pouvoir des militaires en septembre 2022.
Des enlèvements en série à Ouagadougou
Lundi 13 octobre, plusieurs interpellations ont été signalées dans la capitale burkinabè. Ousséni Ilboudo, directeur des rédactions de L’Observateur Paalga, a été arrêté alors qu’il s’apprêtait à diriger la conférence de rédaction quotidienne.
Selon un communiqué du journal publié sur Facebook, il aurait été « embarqué à bord d’une fourgonnette vers une destination inconnue » par des hommes en civil. Depuis, aucune information n’a filtré sur son sort.
Peu avant, Michel Wendpouiré Nana, rédacteur en chef adjoint du quotidien Le Pays, avait lui aussi été enlevé, selon ses proches. Ces deux journaux, parmi les plus influents du pays, dénoncent une opération d’intimidation visant à réduire au silence la presse indépendante.
RSF et les ONG dénoncent une répression systématique
L’organisation Reporters sans frontières (RSF) a immédiatement condamné ces disparitions, exigeant la libération des journalistes. « Plus rien ne semble désormais freiner les autorités militaires, qui poursuivent leur entreprise de démantèlement de la liberté de la presse », a déclaré Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF.
Depuis plusieurs mois, de nombreux journalistes, activistes et opposants affirment être victimes de menaces ou de détentions arbitraires. Les autorités justifient souvent ces mesures au nom de la lutte contre la « désinformation » et les « tentatives de déstabilisation».
Trois magistrats également portés disparus
La crise dépasse désormais le cadre médiatique. Trois magistrats de la cour d’appel de Ouagadougou sont portés disparus depuis la fin de la semaine dernière. Parmi eux figure Urbain Méda, connu pour avoir présidé certaines audiences du procès historique sur l’assassinat du président Thomas Sankara.
Deux autres magistrats, Benoît Zoungrana et Seydou Sanou, ont disparu entre vendredi et dimanche, selon une source judiciaire. L’avocat Arnaud Sempébré serait lui aussi introuvable. C’est la première fois que des membres de la magistrature burkinabè sont ainsi enlevés, un signal alarmant pour l’indépendance de la justice et l’État de droit.
Un climat de peur et de méfiance
Depuis son arrivée au pouvoir en septembre 2022, le capitaine Ibrahim Traoré est accusé de dérives autoritaires et de répression croissante. Plusieurs acteurs de la société civile dénoncent un climat de peur où les critiques envers le pouvoir sont assimilées à des actes de trahison.
La disparition simultanée de journalistes et de magistrats, symboles de la liberté d’expression et de l’équilibre des pouvoirs, illustre la fragilisation progressive des institutions démocratiques au Burkina Faso.
Silence de la communauté internationale
Malgré les protestations d’ONG et de médias, la communauté internationale reste pour l’heure silencieuse. Ni l’Union africaine ni la CEDEAO n’ont réagi officiellement à ces disparitions.
Pour de nombreux observateurs, cette série d’enlèvements marque une étape supplémentaire dans la consolidation d’un pouvoir militaire de plus en plus opaque, où la peur tend à remplacer le débat public et où informer devient un acte de courage.
Source: Afrik.Com
Haoua Sangaré
LETJIKAN








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