Crise diplomatique entre Abuja et Ouagadougou après l’immobilisation d’un avion militaire nigérian au Burkina Faso
- Amadou Diallo
- il y a 3 jours
- 2 min de lecture

L’incident survenu lundi à Bobo-Dioulasso continue d’alimenter les tensions entre le Nigeria et le Burkina Faso. L’immobilisation d’un avion C-130 de l’armée de l’air nigériane et la rétention de onze membres d’équipage ont immédiatement pris une dimension diplomatique, dans un contexte régional déjà marqué par de fortes crispations.
Une situation imprévue devenue affaire d’État
Depuis trois jours, Abuja multiplie les démarches pour obtenir la libération de ses soldats et la restitution de l’appareil. Selon les autorités nigérianes, l’avion, en route vers le Portugal, aurait été contraint de se poser à Bobo-Dioulasso en raison d’une anomalie technique détectée après son décollage de Lagos.
Le ministère nigérian des Affaires étrangères indique que l’ambassade à Ouagadougou mène des discussions directes avec les autorités burkinabè. « L’ambassade du Nigeria à Ouagadougou est en contact avec les autorités burkinabè afin d’obtenir leur libération », a assuré son porte-parole, Kimiebi Ebienfa.
Abuja plaide l’atterrissage d’urgence
Pour l’armée de l’air nigériane, la situation est claire : il s’agit d’un atterrissage d’urgence conforme aux procédures internationales. Le commodore Ehimen Ejodame affirme que l’équipage a été reçu « correctement » par les autorités locales et qu’une inspection technique est en cours pour permettre au C-130 de reprendre son vol une fois réparé.
Abuja insiste sur le fait qu’en cas de détresse, un pilote est tenu de se poser sur la piste la plus proche, même en l’absence d’autorisation préalable.
L’AES accuse une intrusion volontaire dans l’espace aérien
La version de l’Alliance des États du Sahel (AES), qui regroupe le Burkina Faso, le Mali et le Niger, diverge radicalement. Dans un message diffusé sur les médias publics, l’organisation accuse le Nigeria d’avoir pénétré volontairement l’espace aérien burkinabè sans notification officielle. Une enquête interne, affirment ses responsables, n’aurait révélé aucune demande de survol.
À Bamako, le ministre malien de la Sécurité est allé plus loin, qualifiant l’incident d’acte « inamical » et avertissant que tout appareil militaire non autorisé pourrait désormais être « neutralisé ». Cette réaction traduit le climat de défiance persistant entre l’AES et Abuja, notamment depuis le retrait des États sahéliens de la CEDEAO début 2025.
Un contexte régional déjà sous haute tension
Cette affaire intervient alors que le Nigeria soutient la réponse de la CEDEAO au Bénin après la tentative de putsch du 7 décembre, déployant plusieurs avions dans le pays. Une démarche perçue avec suspicion par l’AES, qui accuse Abuja d’appuyer une stratégie régionale « hostile » aux régimes militaires sahéliens.
Dans ce climat, l’arrivée non prévue d’un appareil militaire nigérian au Burkina Faso était difficilement interprétable comme un simple incident technique. L’AES renforce depuis plusieurs mois ses capacités antiaériennes et contrôle étroitement ses frontières, tandis que le Nigeria insiste sur son rôle de puissance militaire majeure en Afrique de l’Ouest.
Un dialogue indispensable pour éviter l’escalade
À ce stade, l’équipage nigérian reste retenu et les discussions se poursuivent. Abuja dit privilégier une résolution « par les voies diplomatiques », mais aucune indication n’a encore été donnée sur la date de libération des soldats.
L’incident constitue un test majeur pour les relations entre la CEDEAO et l’AES. Une médiation régionale ou un dialogue bilatéral de haut niveau pourrait être envisagé pour désamorcer la crise. En attendant, tant que l’avion est immobilisé et l’équipage sous contrôle burkinabè, le risque d’escalade demeure palpable.
Haoua SANGARÉ
LETJIKAN








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